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1 septembre 2011 4 01 /09 /septembre /2011 09:42

Le GuépardMais, « Tout changer pour que rien ne change », c’est aussi prendre en compte le mouvement des masses.

 

Les femmes et hommes de progrès, mais aussi les femmes et hommes conservatrices et conservateurs (mais est-on ou tout l’un ou tout l’autre) ont grand intérêt à relire « Il Gattopardo » de Tomasi di Lampedusa.

 

« Tout changer pour que rien ne change », voilà le credo de Tancrède, jeune aristocrate neveu du Prince Salina, grande famille aristocrate de Sicile imaginée par l’auteur du roman, mais à l’image d’une aristocratie qu’il connaît bien.

 

Ainsi sont battus en Italie les Garibaldiens en 1860 qui doivent remettre les conquêtes populaires à la dynastie de Savoie qui va, avec l’aide de la bourgeoisie française et de Napoléon III permettre la création d’un marché national italien, assis surtout sur un capitalisme agricole qui alimente les villes de haute tradition des anciens Etat de La Renaissance, relativement sous dépendance de la  puissance bourgeoise de l’époque, comme celle de la France, au détriment de l’Angleterre qui a soutenu de longue date la dynastie des Deux Siciles, les Bourbons de Naples, liés au mode de production ancien dépassé.

 

Cela n’est pas nouveau. On sait comment dans les révolutions précédentes, 1830, 1848, en France (et aussi en Europe) la classe ouvrière qui a fourni la chair à canon des prises de pouvoir est rejetée rapidement et massacrée par les nouveaux pouvoirs bourgeois une fois assis et ses intérêts bafoués.

 

L’exemple du juin 1849 à Paris en est un modèle et le massacre de 20 000 Communards  de 1871 « l’apothéose » qui va inciter le mouvement ouvrier, en particulier après la guerre de 1914 et la déroute idéologique de la social-démocratie à s’organiser aussi  « militairement » en complément de son organisation politique et philosophique. Les conséquences de cette organisation « militaire » aura des effets positifs dans les conditions de la crise économico-militaire du début du XX° siècle, mais aura aussi des conséquences néfastes sur l’effort idéologique et de création du mouvement ouvrier.

 

La situation de 1789 est différente : la montée des intérêts de la bourgeoisie face à l’aristocratie absolue qui lui a permis paradoxalement de se développer, contient une aspiration générale à la libération de l’être humain que le mouvement populaire de masse (peuple de Paris, des villes et paysans, ces derniers devenant ensuite l’assise des pouvoirs bourgeois du fait de la réforme agraire, la distribution des terres, inégale mais effective) puis à travers la dictature du Comité de Salut en Public de 1793 qui l’exprime,  va permettre d’aller aussi loin que possible dans les conditions du développement des forces productives du moment (forces productives : les humains et leur moyens de production, dans l’unité, l’imbrication de la création en mouvement commun de ses différents complexes).

 

Mais, « Tout changer pour que rien ne change », c’est aussi prendre en compte le mouvement des masses.

 

Depuis l’unité italienne et l’expansion des démocratie bourgeoises en général, sur lesquelles se sont appuyés les mouvements ouvriers pour introduire dans les moments de crise et d’affaiblissement de la classe dominante « des éléments de socialisme » comme disait Berlinguer, lorsqu’on dit « la bourgeoisie », il faudrait dire et préciser la caste dominante qui en est le summum, l’extraction suprême, car « la bourgeoisie » est une classe devenue si diverse par rapport à sa formation initiale, et il a tant d’écart entre le capitalisme multinational, ses possesseurs et ses gestionnaires « d’en haut », parmi les possesseurs en général de capital, ce que soulignent Gramsci puis Berlinguer dans leur vision de la transformation du mode de production.

 

D’ailleurs une transformation du mode de production ne peut être que l’œuvre des salariés de production au sens strict dont les intérêts qui s’opposent au marché capitaliste et son organisation correspondent immédiatement et directement à cette transformation, de l’union de tout le salariat en tant que classe dans sa diversité et de ses alliés, avec bien sûr les gestionnaires « d’en bas » aptes à s’allier à cette transformation dont l’humanité dans sa totalité  et la nature dans laquelle elle vit ont besoin. C’est là tout le sens de « dictature du prolétariat » qui est mieux traduite par Gramsci sous le vocable « d’hégémonie des couches subalternes » dans le cas ou le terme « dictature » se réfèrerait à une contrainte policière et militaire, à une restriction des libertés, restriction incompatible avec l’initiative de la personne et des masses et qui tue la révolution, la gèle et ouvre la voie à la réaction.

 

Dans « les révolutions Arabes », malgré leurs différences énormes, il y a quelque chose de la révolution italienne du "Risorgimento", à une différence historique fondamentale près : c’est justement la constitution de cette caste internationale qui s’est donné les immenses moyens technologiques d’organisation de travail mondial, de l’information mondiale, des institutions mondiales.

 

Ceci permet à cette caste d’anticiper les mouvements populaires, de les récupérer et même de les susciter afin de concourir toujours plus puissamment au drainage des capitaux vers les monopoles mondiaux financiers-industriels et la spéculation. Que la crise de suraccumulation-dévalorisation des capitaux s’approfondisse ne peut que susciter l’accélération de ces grandes manœuvre militaro-politiques.

 

Les mouvements populaires qui se manifestent de plus en plus puissamment en tant qu’aspiration à la transformation nécessaire d’une société dont l’organisation obsolète et les aspirations mutilées est la cause, ces mouvements peuvent-ils échapper à ces manipulations-récupérations ? Sans doute, mais certainement au prix d’un mûrissement mondial des conditions de transformation qui permette une meilleure coordination générale locale et mondiale de cette transformation.

 

Dans ces conditions, le mouvement populaire a tout intérêt à afficher clairement et ses aspirations et ses difficultés. Ce que n’hésitait pas à faire Enrico Berlinguer dans les années 1970, à la différence de certaines déclaration triomphaliste de l’époque (ce qui cachait la réalité menaçante de la reprise en main par le grand capital, nenaces qui sous-tendait ces mêmes déclarations).

 

Ce n’est qu’à ce prix qu’une conscience collective s’appuyant sur les consciences individuelles pourra mûrir et asseoir les capacités d’action en rapport dialectique.

 

Aborder les mouvements populaires seulement sur un aspect superficiel, apparent, du moment a toutes les chances de répandre un temps la confusion et de retarder leur issue positive.

 

Pierre Assante, 1er septembre 2011

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